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Fêtes johanniques : Homélie du Cardinal Nzapalainga le 8 mai 2024

Homélie pour la fête de sainte Jeanne d’Arc Mai 2024

 

Avant de venir aux fêtes de Sainte Jeanne d’Arc, j’ai fait un pèlerinage et une méditation intérieure dans la vie de cette sainte. J’y ai découvert que Sainte Jeanne d’Arc nous parle toujours et nous inspire partout (même en Afrique) par sa sainteté et son courage à rechercher la libération et in fine la paix. Elle tient une place importante dans la vie du diocèse et de la ville d’Orléans ; également pour la nation entière, deuxième patronne de la France. Aujourd’hui, je suis très heureux d’être parmi vous en cette belle cathédrale et je remercie tout particulièrement Mgr Jacques Blaquart de m’avoir invité, si fraternellement, aux fêtes johanniques de cette année 2024.

La lecture du livre de la Sagesse éclaire notre célébration d’aujourd’hui. Les paroles du Livre de la Sagesse sont lumineuses pour nos existences confrontées à des difficultés, des tentations, un contexte qui n’est pas toujours de bon conseil. Ce texte parle de la sagesse qui vient de Dieu. Pas celle des hommes qui consiste à un ensemble de connaissances acquises par plusieurs années d’expérience. Mais il s’agit bien de la sagesse de Dieu. Celle qui met Dieu au cœur de notre vie, au cœur de toutes nos actions. C’est celle-là qui rejoint notre demande des dons de l’Esprit Saint tellement nécessaires pour conduire notre vie au milieu des récifs qui ne cesseront de la jalonner. Dieu doit être au cœur de tout. C’est ce qu’il s’agit de demander. Et son fruit est la longue vie. C’est ce que la jeune Jeanne d’Arc a compris et a essayé de faire.

Bien que jeune et femme d’action, elle prenait le temps de prier longuement, de se confesser régulièrement, de participer à la messe aussi souvent que possible, tous les jours si c’était possible. Le secret de Jeanne est dans sa foi chrétienne, profonde, lumineuse et nourrie en permanence par sa relation à Dieu. Cette jeune fille de Lorraine a été choisie par Dieu pour un destin unique. Et l’environnement dans lequel Jeanne a vécu et l’éducation qu’elle a reçue y ont contribué. Elle a appris à prier, à fréquenter l’église, à être en relation avec Dieu. Elle restera fidèle à Dieu tout au long de sa vie. La vraie sagesse commence par notre relation constante à Dieu car c’est de lui que nous recevons l’appel, la lumière et l’énergie nécessaires pour comprendre et mener le bon combat de la libération de nos frères et sœurs.

L’évangile choisi pour sa fête est celui de Saint Matthieu qui nous parle du renoncement à soi, du don total de soi au Christ pour être de vrais disciples et apôtres. C’est l’abnégation. Sainte Jeanne renonce à elle-même, elle prend sa croix et suit le Christ. Toute donnée à Dieu et à sa mission, Sainte Jeanne d’Arc offrira sa virginité et sa jeunesse à Dieu. Son don est total, sans ambigüité, sans restriction et sans hésitation. Comme Jésus, elle donne sa vie, elle l’offre en étant condamnée à mort.

Une sainte qui a fait la guerre. Une chose non banale dans la longue histoire des saints, et qui peut même heurter nos sensibilités modernes. Comment comprendre cela ?

En effet pendant la guerre de 100 ans, la ville d’Orléans et bien d’autres contrées de France étaient assiégées par les Anglais. Un contexte d’occupation et de domination qui amène son lot de problèmes : assassinats, oppressions de toutes sortes, réduction de liberté ; un contexte où la souveraineté royale était mise en berne, où la paix sociale et économique étaient en danger. L’armée, à elle seule, ne pouvait pas faire face à cette domination. Comme soudain, voilà qu’une jeune fille (pucelle) prend son courage et passe par les chemins compliqués pour arriver à la tête de l’armée. Elle motive et engage un combat pour la libération du pays et permet au roi d’aller pour se faire couronner à Reims.

Sainte Jeanne d’Arc est aussi une femme de combat. Elle nous apprend que nos combats ne doivent jamais être menés sans Dieu, mais avec Lui. Et c’est Lui qui obtient la victoire. Si Jeanne d’Arc a accompli sa mission, c’est parce qu’elle a obéi à Dieu ; elle n’est pas partie d’elle-même ; Dieu était d’abord dans son projet. Réfléchissons nous-mêmes aux combats que nous menons : combats pour la foi, pour l’évangélisation, de libération de nos frères et sœurs sous domination. Dans un Centrafrique ravagé par les conflits introduits par les groupes armés (Seleka et Antibalaka), nous avons connu et connaissons encore l’occupation et la domination. Trois représentants des religions : un Pasteur (Protestant), un Imam (Islam) et moi-même, Archevêque de Bangui, nous étions mis ensemble pour prier et nous lever comme un seul homme pour sillonner tout le pays afin de désarmer les cœurs, faire libérer les zones occupées et annoncer la paix par la Parole de Dieu. Même si nos intentions sont bonnes, Dieu est-il à l’origine de nos actions ? Oui ! Avons-nous été écoutés par tous ces gens ? Oui ! Car c’est la victoire de Dieu lui-même. Nous devons faire l’œuvre de Dieu.

Nous devons entendre également le témoignage de Sainte Jeanne lors de son procès à Rouen : « Dieu le commandait, il convenait de le faire ». « Dieu premier servi ». « La voix de Dieu m’a appris à bien me diriger ».

Orléans, 8 mai 2024

Cardinal Nzapalainga